Diffamation envers un maire
- Cyrille Emery
- 19 janv. 2016
- 2 min de lecture
La loi sur la presse ne punit la diffamation envers un maire que si sa fonction a été le moyen d’accomplir le fait imputé, ou si elle en a été le support nécessaire.
"Il est où le maire que je l'étrangle !"
Le maire de la commune de Lège-Cap-Ferret avait fait citer directement devant le tribunal correctionnel M. X du chef de diffamation publique envers un citoyen chargé d’un mandat public, pour avoir publiquement tenu à son encontre les propos suivants : « Fils de crapule, le maire est une crapule, il est où le maire que je l’étrangle, D… assassin, incendiaire, voleur, vous n’êtes que des merdes, des sous-merdes, retournez en Corse, il faut leur tirer dessus et ne pas être lâche comme en 40, il faut les dénoncer, il faut les étrangler ». Le tribunal correctionnel ayant annulé la citation, la cour d’appel devait annuler le jugement. Constatant que les propos litigieux s’inscrivaient dans la suite d'un différend ancien entre les parties, concernant l’incendie d’un hangar du prévenu survenu quelques jours plus tôt et imputé à la partie civile, elle condamnait le prévenu à 5 000 euros d’amende.
Statuant sur le pourvoi de la partie civile, la chambre criminelle a cassé et annulé l'arrêt. Elle a jugé que « le fait imputé ne constituait ni un acte, ni un abus de la fonction du maire, et se trouvait dépourvu de tout lien avec ladite fonction, la diffamation ne concernant que le particulier ».
Or l’article 31 de la loi sur la presse réprime spécialement les diffamations commises envers des personnes publiques « à raison de leurs fonctions ou de leur qualité », ce qui suppose d’abord d’identifier cette qualité ou ces fonctions puis d’établir un lien entre ces dernières et le propos diffamatoire. Pour la Cour de cassation, « ces diffamations […] doivent s’apprécier non d’après le mobile qui les ont inspirées ou le but recherché par leur auteur, mais d’après la nature du fait sur lequel elles portent ». L’imputation à M. D… d’un incendie ne le visait pas en sa qualité de maire mais en celle de particulier, la qualification applicable était donc celle visée l’article 29 et non à l’article 31 de la loi sur la presse.
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